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Le Grand Patriarche du Poker

Johnny Moss est né le 14 mai 1907 dans la petite ville de Marshall, au Texas. La mère de Johnny est décédée subitement de complications liées à une appendicite alors qu’il n’avait que huit ans, et son père a été gravement blessé dans un accident du travail quelques mois plus tard. Suite à ces événements tragiques, Johnny s’est mis à vendre des journaux pour payer les factures. À l’adolescence, Johnny vivait déjà seul à Dallas. C’est durant cette période qu’il a commencé à travailler pour la Western Union Telegraph Company. Quand Johnny avait du temps libre en dehors du boulot, il traînait dans les salles de billard locales et pariait de petites sommes sur les parties. Chaque petit billet supplémentaire qu’il pouvait envoyer à son père était précieux. C’est dans ces repaires qu’il a rencontré l’icône du jeu américain et patron de la mafia Benny Benion, qui lui a appris à jouer aux cartes. Benny a été une figure importante dans la vie de Johnny, non seulement pour lui avoir enseigné le jeu qui ferait sa fortune, mais aussi pour avoir organisé certaines des parties de poker historiques les plus importantes qui allaient graver le nom des Moss dans le marbre pour l’éternité.

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En 1923, à l’âge de 16 ans, Moss a décroché un emploi à temps plein dans un endroit appelé l’Otter’s Club où il a été formé pour repérer diverses formes de triche et de comptage de cartes. Johnny s’asseyait au bord de la table et gardait un œil sur les croupiers comme sur les joueurs. On peut supposer que ces longues heures passées à observer des experts perfectionner leur art au tapis ont inspiré la passion de toute une vie de Johnny pour le poker. Une bonne soirée de cartes à l’Otter’s Club, selon Moss lui-même, pouvait lui rapporter jusqu’à 500 $ – l’équivalent d’environ 7 500 $ en 2020. Johnny a passé deux ans à travailler à l’Otter’s Club et dans un autre casino de Dallas appelé l’Elk’s Club avant de décider de devenir rounder à plein temps – un joueur qui parcourt le pays à la recherche d’action au jeu. Un boom pétrolier considérable dans la région du Texas allait s’avérer lucratif compte tenu du nouveau choix de carrière de Johnny. Il n’était pas rare que des hommes d’affaires, les poches gonflées d’argent frais, misent des centaines et des milliers de dollars par main. Pour quelqu’un d’aussi futé que Johnny, l’argent poussait pratiquement sur les arbres. Il n’était pas inhabituel pour Johnny de remporter des pots d’un million de dollars en une seule soirée. Johnny a voyagé dans de nombreux États pour se mesurer aux meilleurs joueurs des États-Unis. N’ayant reçu, au mieux, qu’une éducation formelle très limitée et armé seulement d’un solide instinct de survie et d’une intelligence de la rue aiguisée, à la fin des années 1920, il était devenu un homme riche. Tout au long de sa vie, Johnny était un homme d’extrêmes. Malgré son quasi-illettrisme, Moss avait l’habitude de faire des investissements judicieux une minute, puis de dilapider follement ses économies la suivante.

La Première Femme du Premier Homme du Poker

La première femme à capturer son cœur fut une certaine Virgie Ann Mouser. Johnny a eu du mal à convaincre le père de celle-ci d’autoriser le mariage compte tenu de son titre professionnel peu reluisant, mais les registres de l’État montrent que le couple s’est marié le 1er mai 1926. Très peu d’informations sont disponibles sur leur relation au-delà de ce point. Il n’existe aucun registre officiel de divorce et aucun article ne mentionne sa femme après le mariage, donc son premier mariage restera un mystère.

Johnny avait un appétit formidable pour la compétition et était un Texan intrépide jusqu’au bout des ongles, l’esprit d’aventure indomptable des cowboys coulant dans ses veines. Un soir, alors qu’il jouait dans l’arrière-salle d’un casino depuis longtemps oublié, Johnny a remarqué des trous d’observation percés dans le plafond au-dessus des tables de poker. Johnny a hoché la tête et a porté la main au pistolet accroché à sa ceinture. Il a désactivé la sécurité et a pointé l’arme vers le haut, avertissant que si les trous n’étaient pas bouchés immédiatement, il ouvrirait le feu. Dans certaines versions de l’histoire, Johnny a tiré avec le pistolet, blessant un employé du casino caché dans le grenier !

Le Poker dans Sports Illustrated

Dans une interview de janvier 1971, publiée dans le magazine Sports Illustrated, Johnny a parlé des parties à gros enjeux jouées au plus fort du boom pétrolier texan :

« Si tu jouais une semaine, tu pouvais gagner un million de dollars, le gagner en une nuit si ça se présentait bien. Il y avait des parties, comme au vieux Metropolitan Hotel à Fort Worth, où personne ne croirait les sommes en jeu si je te les disais aujourd’hui. De toute façon, il faut être un bon joueur pour devenir riche dans le business du pétrole. Certains de ces joueurs sont sortis de là avec 40 millions de dollars, entre le poker, les dés, les concessions pétrolières et tout le reste. L’argent ne signifiait rien pour eux, mais le jeu, si. Certains de ces grands pétroliers de l’ancien temps jouent encore à de grosses parties de poker, mais seulement pour le plaisir d’écraser un joueur professionnel s’ils le peuvent. J’aime bien les voir débarquer. »

Le GOAT Originel du Poker

Gains au poker et caractère de gentleman sudiste mis à part, une majorité de gens pensent que Johnny Moss pourrait avoir été le plus grand tricheur de poker de l’histoire du poker, peut-être même de l’histoire des tricheurs ! Quelle meilleure façon d’apprendre l’art de la tromperie que de passer ses années de formation à observer les meilleurs joueurs tricher pour accéder aux coffres les mieux garnis ? Moss a toujours nié être un joueur malhonnête, mais il y a peu de doutes à ce sujet. Le poker était un jeu différent à cette époque. Pour chaque gentleman joueur testant honnêtement ses compétences, il y avait dix petits malins désespérés de trouver un raccourci vers la richesse exorbitante.

Johnny était également extrêmement friand de bowling et de golf, deux passe-temps différents qui lui permettaient de faire de gros paris, gagnant selon les rapports plus de 2 millions de dollars grâce aux paris sur le terrain de golf. Une histoire célèbre raconte que Moss a fait un pari avec un homme d’affaires fortuné qui consistait à jouer pour 50 000 $ par trou. L’argent de Moss pour le pari était avancé par la mafia. Au début de la partie, Moss perdait. Pendant que Moss se creusait un trou financièrement, les gangsters creusaient littéralement un trou au cas où l’homme d’affaires gagnerait le match. Moss a réussi à se remettre dans le coup (jeu de mots voulu) vers la fin de la partie et a fini par en sortir victorieux. L’homme d’affaires fortuné est venu lui serrer la main, disant à Moss qu’il devait être l’homme le plus chanceux du monde, ce à quoi Moss a répondu : « Non, monsieur. C’est vous. » Moss a sauvé la vie de l’homme d’affaires avec son dernier birdie, le tout sans que l’homme soit même conscient d’un quelconque danger imminent.

Bien que les accusations de triche soient nombreuses, la place de Johnny sur le Mont Rushmore des joueurs de poker ne fait aucun doute. Johnny a gagné des millions de dollars en jouant aux cartes et en pariant sur le sport, mais l’argent gagné au jeu est aussi facile à obtenir qu’à perdre. Il n’aurait pas été inhabituel de voir Johnny passer d’une table où il avait gagné des milliers de dollars à une table de dés où les gains seraient perdus en quelques minutes. Johnny a un jour donné à sa femme 200 000 $ pour acheter une maison, mais a dépensé le reste de ses économies durant la nuit. Le lendemain matin, il a dû demander à sa femme de lui rendre l’argent pour qu’il puisse se remettre à reconstruire leur fortune. Moss aurait dilapidé 8 millions de dollars au cours de sa vie.

Texas Hold’em Poker Contre Nick ‘Le Grec’

Il y a aussi l’histoire du célèbre patron de la mafia et propriétaire de casino Benny Binion, l’homme qui a appris à Johnny Moss quelques ficelles du métier. En 1951, Benny a appelé pour dire à Johnny qu’il organisait un tournoi spécifiquement pour que Johnny puisse jouer contre le tristement célèbre Nick ‘Le Grec’ Dandolos dans son fameux Horseshoe Casino. Chaque main jouée serait ouverte au public comme divertissement. Benny avait installé les deux maîtres des cartes à l’entrée principale du casino pour que tout le monde puisse regarder et s’émerveiller. La partie a continué, jour après jour, pendant cinq mois. Pour Benny, la partie était un coup de pub destiné à attirer le public dans son casino. Pour Johnny, c’était comme avoir une licence pour imprimer de l’argent. Moss aurait gagné plus de 2 millions de dollars contre ‘Le Grec’. Dandolas, dépité après avoir perdu une somme aussi massive, a un jour prononcé la phrase célèbre : « Monsieur Moss, je dois vous laisser partir. »

Bien que cela fasse une belle histoire, c’est tout ce que c’est – une histoire confirmée. Aucun article de journal n’a été trouvé mentionnant que la partie ait été jouée publiquement et Binion n’en a fait aucune mention lors d’une vaste interview d’histoire orale qu’il a donnée durant les premiers tournois des World Series of Poker.

Les World Series of Poker et Johnny

De nombreuses années plus tard, en 1970, Binion a de nouveau appelé son vieil ami Johnny Moss pour l’informer d’un nouveau tournoi qu’il voulait organiser. Binion prévoyait d’inviter les meilleurs joueurs de poker de l’époque pour une partie d’argent à gros enjeux dans son casino. Quand la partie se terminerait, les joueurs voteraient entre eux pour savoir qui serait couronné roi. Les joueurs ont écrit qui ils pensaient être le meilleur joueur, mais tout le monde a griffonné son propre nom. Quand on leur a dit d’écrire le nom du deuxième meilleur joueur à la table, Johnny a été élu vainqueur des toutes premières World Series of Poker. L’année suivante, un format de tournoi à élimination a été utilisé pour la première fois et Moss a battu cinq autres joueurs pour son deuxième championnat WSOP d’affilée. Johnny a remporté son troisième championnat WSOP en 1974, un événement à buy-in de 10 000 $, le vainqueur remportant tout avec un total de 16 participants. Moss a gagné cinq autres bracelets WSOP en 1975, 1976, 1979, 1981 et 1988. Il avait 81 ans quand il a remporté son dernier bracelet en 1988.

Entre 1970 et 1995, Johnny Moss était présent à chaque édition des World Series of Poker et a accumulé un total de neuf bracelets WSOP durant cette période. Johnny Moss a passé le reste de sa vie à vivre à Vegas où il est finalement décédé le 16 décembre 1995. Quoi de plus approprié, l’un des plus grands joueurs de poker de l’ère moderne mourant dans la Mecque néon du jeu ? Johnny Moss et les hauts et les bas qu’il a connus au cours de sa longue vie à jouer aux cartes racontent aussi l’histoire de nombreux autres joueurs moins célèbres que lui. Une parfaite allégorie pour tant de cowboys nés hors de leur temps. Les sommets donnent le vertige et les creux peuvent être écœurants, voire déchirants. Johnny Moss restera à jamais dans les mémoires comme un monument à l’excès et à la générosité en parts égales.

Note de l’Éditeur :
Le monde tel que nous le connaissons a énormément changé par rapport à ce que les joueurs de la première moitié du XXe siècle ont vécu. Il n’y avait pas de téléphones portables, ni d’internet. Les automobiles commençaient tout juste à devenir courantes et les vols transatlantiques abordables étaient encore un peu dans le futur. Les ordinateurs et les voyages spatiaux étaient aussi éloignés de la société que les dragons et les fées. L’information n’était pas aussi accessible qu’aujourd’hui. À cause de cela, et de la propension d’un joueur à oublier miraculeusement tout et n’importe quoi dans le cadre d’un code non écrit, beaucoup d’histoires et d’anecdotes qui proviennent de cette époque pourraient être pleines d’hyperboles et ne pas être entièrement fidèles ou représenter avec précision ce qui s’est passé. Cependant, les histoires orales que nous avons, telles qu’elles ont été racontées au fil des ans, sont maintenant tout ce qui reste de cette époque ancienne. Si certains récits sont inexacts ou carrément mensongers, il est important de savoir que ce n’était ni intentionnel, ni l’intention de l’article.

-The Wordsmith,
Mis à jour le 6 décembre 2022

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